Diaconat féminin : « Le plus important,
Bénédicte Draillard, juge auditeur au tribunal ecclésiastique de Lyon et directrice littéraire aux éditions Nouvelle Cité.
« Depuis la restauration du diaconat permanent par le Concile Vatican II pour des hommes mariés ou célibataires, les fidèles qui voient des hommes diacres exercer leur ministère dans leur communauté se demandent si des femmes ne pourraient pas devenir elles aussi diacres permanents. C’est une question légitime et pertinente.
Je me réjouis profondément que le pape François soit prêt à lancer une étude sur le diaconat féminin. Il y a longtemps que j’attendais cela, car de très nombreuses femmes pourraient mettre tous leurs talents, au service de la communauté chrétienne.
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Le rôle du diacre est théologiquement caractérisé par la triple diaconie de la liturgie, de la parole et de la charité. Sur le plan de la charité, les femmes font déjà largement leur part. Sur le plan de la liturgie, aussi. Personnellement, c’est donc la diaconie de la parole qui me paraît la plus importante.
On sait les talents des femmes pour la parole, du fait de leur réalisme, de leur sens pédagogique de leur finesse et de leur profondeur… Mais jusqu’à présent, la prédication dominicale, au cours de l’Eucharistie, est interdite aux femmes. Pourquoi n’entendrait-on pas aussi les femmes dans les églises ?
Rien n’empêche des femmes d’accéder au ministère du diaconat
Par ailleurs, le diaconat permanent en général est une force vive pour l’Église, et pas seulement du fait de la raréfaction des prêtres. J’ai eu l’occasion de prêcher une retraite de trois jours en février dernier devant les diacres et leur épouse du diocèse de Nice et je me suis rendu compte combien tous contribuaient à humaniser concrètement le visage de l’Église.
Qu’il y ait parmi les ministres de l’Église des personnes mariées, c’est très important. Nul doute aussi que des femmes diacres permettraient à des femmes de se confier avec plus de spontanéité, en raison de leurs expériences communes. Ainsi la question du diaconat féminin doit être pensée et prise en compte dans celle du diaconat permanent en général.
Certes, dans le passé, plusieurs commissions ont travaillé sur cette question, et cela n’a pas débouché sur grand chose. Mais cette fois-ci, la personnalité du pape François me donne bon espoir de voir les choses bouger. D’abord parce qu’il est ignatien et que les jésuites ont souvent été précurseurs. Ensuite parce que son cheval de bataille, c’est la nécessité d’affirmer davantage la présence des femmes dans l’Église.
Pour autant, je reste dubitative quant à la question de l’ordination. Faut-il absolument qu’une femme soit « ordonnée » diacre ? Ne devrait-on pas réserver l’ordination aux hommes seuls, dans la mesure où l’ordination configure au Christ et que le Christ n’a choisi que des apôtres masculins ?
Mais cela n’empêche pas, qu’elle soit ordonnée ou pas, que la femme diacre puisse se voir confier les mêmes missions sacramentelles qu’un diacre homme. À savoir surtout le baptême (c’est déjà le cas puisque, en cas d’extrême urgence, un fidèle baptisé peut baptiser un enfant ou un adulte) et le mariage (le prêtre ou le diacre n’étant que témoin du sacrement que se donnent les deux fiancés, une femme peut parfaitement être témoin).
Canoniquement, il n’y a donc pas de problème : rien n’empêche des femmes d’accéder au ministère du diaconat. Et tout ce que fait un diacre homme, une femme peut le faire… si ce n’est la prédication qui lui reste interdite. C’est donc bien cela le plus important. »
Recueilli par Claire Lesegretain