AMORIS LAETITIA
L’exhortation apostolique du pape François Amoris Laetitia, publiée en 2016, a sans doute ouvert la voie à une meilleure compréhension et un accueil plus généreux des divorcés, spécialement des divorcés remariés, au sein de l’Eglise. Mais pour ma part tout au long de la lourde épreuve du divorce, qui pour moi date de 2006 (donc 10 ans avant Amoris Laetitia) après trente ans de mariage et trois enfants, j’ai toujours rencontré compréhension et soutien de la part des prêtres et religieuses que j’ai été amenée à fréquenter. Il est vrai que, sans que ce soit un choix délibéré, je ne me suis pas remariée : cela peut expliquer la compassion sans réserve que j’ai reçue.
Mais je ne pense pas qu’il faille se limiter à cette explication un peu mesquine. En effet j’ai pu constater dans mon métier de professeur de l’enseignement privé catholique, que certains collègues divorcés et remariés exerçaient des responsabilités pour lesquelles on leur accordait une confiance totale – à juste titre- et qu’ils étaient intégrés à la vie de l’établissement, y compris pastorale, sans discrimination notable. Cela peut paraître la moindre des choses, mais je crois que cela n’a pas toujours été le cas. Cette évolution dans le regard posé sur les divorcés et sur leur rôle au sein d’une communauté éducative chrétienne constituait déjà un réconfort.
Cependant même si je ne me suis pas remariée, j’ai pu comprendre intimement la profonde souffrance d’être écarté de l’Eucharistie en cas de remariage, et le sentiment d’injustice spirituelle engendré par cette mesure qui semble ajouter une « punition » imméritée et peu christique à la souffrance initiale du divorce. J’ai pu mesurer le risque de s’écarter non seulement de l’Eglise mais de la foi dans ce déchirement. J’ai alors eu la chance de rencontrer le groupe Revivre d’Oullins et d’y participer. Ce groupe de chrétiens divorcés, remariés ou non, se donne pour objectif d’aider à « revivre » après cette épreuve, et de témoigner que c’est possible, non seulement par un puissant réconfort affectif, amical, mais aussi et surtout par une reconstruction spirituelle, un lien renouvelé de confiance dans l’amour du Christ, et une juste place retrouvée dans l’Eglise. Les nouvelles perspectives de compréhension et de miséricorde apportées par Amoris Laetitia ne pouvaient évidemment que nous réjouir.
Je ne voudrais pas terminer sans évoquer une des Béatitudes, qui m’accompagne depuis des années en dévoilant peu à peu sa charge mystérieuse, déchirante, lumineuse d’espérance. Elle dépasse le cadre du divorce, et rejoint toutes les souffrances du monde: « Heureux ceux qui pleurent, car ils seront consolés ».